« La solitude, bien plus qu'un soutien, un véritable ami. »

(c) lilday & emma

ARO - « J'ai quelque chose à te demander une fois de plus, mon cher Emeric »

La silhouette raide et immobile, le vampire brun attendait les phrases qui suivraient cette question. Il guettait les moindres sons et intonations qui sortaient des lèvres de celui qui se disait son maître, Aro Volturi. Néanmoins, Emeric savait de quoi il était question. De Renesmée, une fois de plus. Son amie paraissait plus réticente à s'adapter à la vie à Volturra que lui, d'après les trois dirigeants. Mais s'ils savaient à quel point ils avaient faux sur toute la ligne. Le beau Dixwayne était plus enclin à supporter l'emprisonnement en silence, décidant de sa vengeance au moment venu. Puis, d'une délicate courbette révélant une nuque d'un blanc parfait, il tourna le dos aux trois sièges qui régnaient en maître dans la salle et s'éloigna à grandes enjambées. La même mission - s'il pouvait dire - lui était donné à nouveau, ou plutôt une corvée de plus à bâcler. Que lui importait qu'Aro désire quelque chose! Ce qui l'intéressait réellement était le bonheur et le bien-être de son amie, qui se trouvaient franchement perturbés. Elle désirait s'échapper de Volturra, et il sera là pour lui prêter main forte et s'échapper à son tour. Alors peu importe les ordres qu'il reçoit, il ne les accomplira pas. Au ressenti de ce fourmillement, Emeric sentit à quel point désobéir et se rebeller lui plaisaient. Un mélange d'excitation, de plaisir sauvage, de palpitations redoublées... Tout autant de ressentis qui faisaient qu'il n'hésita pas à braver l'autorité du maître du monde des vampires. Que pouvait-il bien lui arriver, de toute façon? Ils avaient besoin de lui et de son don, ici, aucun mal ne lui sera fait.
Il quitta donc le palais, et chercha néanmoins son amie, plus par désir de sa compagnie. Il eut beau faire le tour des coins qu'elle affectionnait, aucunes traces de la jeune femme. Etait-il occupée? La chose était possible. Quoiqu'il en était, il finirait donc sa journée seul, comme beaucoup de moments ces derniers temps.

Ses pas frôlaient les pavets d'une rue en silence, possédés par une détermination et une assurance palpables. Les traits de son visage étaient tirés, comme lorsqu’il était plongé dans une de ces réflexions tordues. Celles qui le préoccupaient, le rendaient soucieux, alors qu’étant simple de nature. C’était en cela, que fleurissait la complexité de cette créature froide. Mais il n’était sûr de qu’une chose, aussi simple que bonjour à ses yeux : il possédait un don qu'Aro désirait. Chose qui pouvait l'aider à exercer pression en cas de nécessité. Si sa vie avait pu différente... Si seulement il avait pu naître humain. Rien de tout cela ne lui serait arrivé, et il serait encore entouré de cette personne qui lui faisait tant défaut malgré son assurance, sa confiance et sa force, à savoir sa mère. Tout, il avait l’impression de tout revivre comme si c’était arrivé la veille, alors que l’affaire remontait à de nombreuses années. Mais si le monde se rendait compte à quel point c’était peu, lorsque l’éternité nous est offerte… Offerte. Le mot sonnait bien faux, il voyait là cette capacité comme un malheur, une malédiction. Qui voudrait vivre pour toujours en étant privé de la seule personne qu'on a aimé et qui vous a aimez jusqu'à donner sa vie pour la votre? Oui, c'était en cela que Emeric souffrait. Partout autour de lui il ne voyait qu'amour et bonheur. Ces deux sentiments le révoltaient lorsqu'il arrivait à admettre qu'en présence d'une certaine personne, il était comparable à tous les autres. Cette personne n'avait pas besoin d'être nommée, et ne le serait de toute façon pas.
Un bruit d'une grande légèreté attira son attention et dissipa toutes ses pensées préoccupantes. Il redevint l'impassible hybride, celui qui ne ressent aucuns sentiments pour et envers personne et qui est capable d'être différent aux yeux des autres pour se préserver. Son regard d'un noir étincellant fouilla les alentours avec attention. Mauvaise rencontre, ou non? Dans tous les cas, il attendait que le nouveau venu se présente à lui, sans crainte ni peur. De quoi devrait-il avoir peur?

Ses sens en alerte, il guettait les moindres gestes et pas que la personne en face de lui effectuait. A en juger par le rythme qui lui parvenait aux oreilles, le nouvel individu n'était pas comme tout ces humains qu'il croisait sans cesse. Un vampire? Un hybride, comme Nessie et lui? Ou quelque chose d'autre de bien plus inquiétant? Une petite voix au fond de lui penchait pour la dernière proposition. Une force autre que la sienne l'attendait à quelques pas, dans l'obscurité. Le bon sens lui aurait fait faire rapidement demi-tour pour regagner la sécurité de Volterra. Mais une autre voix, plus excitante à son goût, moins sage accélérait les battements de son coeur et le poussait en avant.
Sa marche reprit progressivement mais avec assurance et, son regard ayant marqué un temps d'arrêt sur le visage qui lui parlait de plus en plus, il se rapprochait à grandes enjambées de la nouvelle venue. Quoi? Nouvelle venue? C'était donc de ce corps frêle et délicat que lui parvenait cet aurat? Qu'était-elle pour dégager un tel parfum? Sûrement pas humaine, sinon Emeric n'en serait aucunement attiré. Le sang humain n'avait pas ce fumet exquis que ses compatriotes sentaient. Pour lui, de ces mortels exhalaient une sorte de malaise, de fruit interdit, de poison. Il n'en était pas peu fier de faire parti des rares qui savent se retenir face à la tentation. En cela ressortait sa force d'esprit et de volonté qui restaient lisibles sur son visage aux traits d'ange. Ange... Il était loin d'en être un de par sa véritable nature. Ces créatures du ciel étaient censées faire rêver, rassurer. Certes de nombreuses humaines ont été prises au piège de son physique sans défauts, mais il n'est en rien un être de rêve. Buveur de sang, créature de glace et de tromperie, en quoi ces caractéristiques pouvaient plaire? Les femmes ne désiraient qu'une chose: qu'on ne leur mente pas. Et avec un pareil mensonge à porter mais un tel physique, Emeric était certain d'attirer leur regard à défaut de leur coeur. Nombreuses égalements ont été celles qui ont découvert sa véritable nature, et qui ont été exécuté à cause de cette curiosité typiquement féminine. Leurs hurlements lorsque l'un des trois frères exécutent la tâche fatale, leurs supplications, leurs promesses de silence vaines... Rien, l'hybride n'oubliait rien.

« Il n'est pas prudent de se promener dans ces rues à une heure aussi tardive... Seule, de surcroît. »

Emeric engageait enfin la conversation avec l'inconnue. Toute prudence abolie, il réagissait en fonction de son instinct, qui jusqu'ici ne l'avait jamais déçu. Ce n'était pas seulement son joli minois qui l'attirait, mais ce il-ne-savait-quoi qu'elle dégageait. Du mystère, du danger, de l'inconnu. Tout ce que lui-même dégageait. Son corps qui dominait la jolie jeune femme s'adossa contre le mur le plus proche, les bras croisés. Son regard paraissait curieux, observateur mais en aucun cas envahissant. Il était de ces personnes qui se renseignent visuellement sans que la personne visée ne se sente importunée. Si les gens avares de question savaient à quel point le regard dévoilait le coeur et l'âme... Ils seraient sans aucun doute contraint au silence: après avoir apprit à comprendre le langage, cela va de soit.